La Monarchie (Latin : Regnum Romanum), selon le légendaire romain, aurait été fondée à Rome, par Rémus et Romulus en -753. La monarchie aurait été abolie à la chute de Lucius Tarquinius Superbus en -510. Selon la tradition, sept rois ont régné sur Rome (Romulus, Numa Pompilius, Ancus Marcius, Tullus Hostilius, Tarquin l'Ancien, Servius Tullius et Tarquin le Superbe), depuis la fondation de la ville en -753 jusqu'à la révolution de -509 qui a chassé le dernier souverain pour instaurer la République romaine.
La forme de la Monarchie
Selon la tradition rapportée par
Tite-Live notamment, après la
Guerre de Troie, le héros troyen
Énée traverse la Méditerranée et fonde la ville de
Lavinium en
Italie. Son fils
Ascagne fonde la ville d'
Albe-la-Longue. De cette famille naîtront les jumeaux
Romulus et
Rémus. Les rois, à l'exclusion de Romulus, fondateur de la ville, étaient choisis à vie, par les
gens de Rome. À l'origine, il semble qu'une assemblée de
senes (homme mûr) et
patres familiarum avait autorité sur les membres de leur famille mais aussi sur le plus grand nombre possible de
clients. Ces
Patres, réunis en
sénat, nomment un
rex, provisoirement doté du pouvoir durant l'
Interrègne. Le Roi est ensuite choisi par les
Comices curiates mais n'est définitivement nommé qu'après que les
augures confirment que la décision est favorable. Le sénat devait contrôler tout le processus. Selon la tradition, aucun roi n'eut à faire usage des armes pour prendre le pouvoir. Le pouvoir ne semble être devenu héréditaire qu'à partir du quatrième roi. Ce qui fera dire aux républicains que les rois anciens étaient choisis en fonction de leurs vertus et non pas de leurs origines. On ne sait pas quelle est la nature exacte du pouvoir, c'est-à-dire si la fonction possédait réellement un pouvoir ou si le roi était soumis à une assemblée. Il semble que les décisions du roi, à partir de
Servius Tullius, pouvaient être discutées par les
Comices curiates et devaient être validées, mais on ne sait pas si le pouvoir du roi était absolu. Ce qui est sûr, c'est que seul le roi possédait le droit d'effectuer l
'auspice et donc de connaître les
augures. Le fondement même de la foi romaine reposait sur la mise en concordance entre les actions et la volonté des dieux. Par conséquent, aucune affaire publique ne pouvait être exécutée sans que la volonté des dieux fût connue par l'intermédiaire des auspices. Les romains reconnaissaient le roi comme un médiateur entre eux et les dieux et selon la tradition
Romulus fut le meilleur des
Haruspices. La fonction de
Pontifex maximus est créée selon la tradition par
Numa Pompilius, mais la fonction de
Rex Sacrorum reste primordiale dans les rites, si bien que même la monarchie abolie, elle continuera à exister. D'autre part, le roi disposait de l
Imperium, du pouvoir judiciaire, de la possibilité de nommer les fonctionnaires, les membres du sénat et surtout le Préfet de Rome, qui avaient tous les pouvoirs lorsque le roi n'était pas en ville.Les attributs royaux
Les rois avaient le droit de s'asseoir sur la
Chaise curule, de porter la
toga picta, des chaussures rouges, et un diadème blanc autour de la tête. La toge pourpre étant le principal signe. Le roi pouvait également se faire accompagner de
licteurs porteurs de
Fasces, une hache symbolisant le pouvoir de la justice.
Liste traditionnelle des rois
Article détaillé : .Une monarchie mythologique
Le
philologue et
Comparatiste Georges Dumézil voit dans la succession des premiers rois un exemple des fonctions tripartites indo-européennes :
Romulus le fondateur et le pieux
Numa Pompilius exerçaient la fonction souveraine, à la fois organisatrice et sacerdotale,
Tullus Hostilius la fonction guerrière, et
Ancus Marcius le bâtisseur la fonction productrice.
A chaque souverain, on attribue généralement une contribution particulière dans la naissance et la création des institutions romaines et dans le développement socio-politique de la cité :
- Romulus est considéré comme le fondateur de la ville, à laquelle il donna ses principales institutions civiles, l'extension du territoire contrôlé par Rome ainsi que le meilleur des augures.
- Numa Pompilius créa les principales institutions religieuses
- Tullus Hostilius, en battant les Sabins et en conquérant Alba Longa, amorça l'expansion territoriale dans le Latium
- Ancus Marcius initia la fondation du port de Rome par excellence, Ostie
- Tarquin l'Ancien érigea le temple de Jupiter Capitolin et construisit le Cloaca Maxima
- Servius Tullius divisa la population citadine en cinq classes de Cens et construisit la première enceinte fortifiée (Mur servien)
- Tarquin le Superbe qui, à cause de son comportement arrogant et de son mépris envers les citoyens et les institutions romaines, fut chassé par le peuple en -509.
Bilan de la monarchie
Selon certaines sources, le
consulat n'est pas une institution latine, car l'habitude, à la chute de la royauté, était plutôt d'instituer un magistrat unique ayant un pouvoir immense mais pour une durée limitée. Aujourd'hui encore, les historiens ne savent pas d'où peut provenir l'idée d'un pouvoir partagé à l'identique entre deux consuls pour une durée faible. L'idée romaine qui est à l'origine de la création de la
République romaine, semble donc profondément originale.
Le régime des rois étrusques va faire aussi prendre conscience aux Romains de la notion de corps civiques, en dehors du contrôle exclusif et très local de l'aristocratie. D'autre part les relations religieuses qui sous-tendent la relation client-patron s'étiole, le culte des ancêtres s'est transformé en culte des héros. Le populus va prendre conscience qu'il forme la Plèbe et les institutions reconnaître son existence et la fonction subalterne de cette plèbe.
Après la chute de Tarquin, l'idée de la monarchie a continué, même pendant l'empire, à être détestée. Jules César, alors qu'il accumulait tous les pouvoirs, a refusé le symbole que constituait le diadème blanc de la main de Marc Antoine sous les applaudissements. La charge honorifique de Rex sacrorum , sous la République, pourtant essentielle aux rites religieux, était mal considérée par les romains.
Histoire de Rome durant cette période
Articles détaillés : .L’archéologie a constaté que depuis le
Xe siècle av. J.-C., la région enregistre un lent développement de l’agriculture dans toute la zone du
Latium avec l’implantation de nombreux villages, dont Rome n’est qu’un parmi d’autres (
Ardée,
Lavinium,
Albe la Longue, etc.). Les Latins et donc les Romains cultivent des céréales pauvres (épeautre ou
far et
orge), de la vigne (la
vitis vinifera est attestée dans les tombes du
Forum romain), l’olivier, le pommier et le figuier sont connus. Comme tous les peuples de la région, la société s'appuie sur le
Clientélisme et les
gens les plus influents dirigent au sein d'assemblée appelée les
curiae. Ces assemblées sont essentielles pour organiser la défense et la gestion des biens collectifs. La terre est en effet pour partie, propriété commune et doit donc être gérée. Chaque maison a son jardin, y compris dans le périmètre de Rome, produisant choux, raves, fèves, lentilles. L’élevage, sur l
Ager publicus, est une activité importante, symbole de richesse (le latin pecunia a les deux sens, bétail et richesse). Les Romains élèvent moutons et chèvres pour la viande et le fromage, boeufs, ânes et chevaux comme animaux de trait. Le boeuf est l'animal de trait par excellence pour l'agriculture ; le lait des vaches est consommé en fromage - le lait frais est de préférence tiré des chèvres. L'Aviculture ne semble pas être intensivement pratiquée. Dans les lagunes aux bouches du Tibre on recueille le
sel, produit exporté vers les montagnes par le chemin qui deviendra la
Via Salaria, tandis que les forêts côtières fournissent en abondance le bois. De nombreuses divinités agraires témoignent de l’activité agricole :
Liber pour la vigne,
Pomone pour les arbres fruitiers, Terminus pour les bornes limitant les champs, etc. La culture romaine de l'époque était pastorale. À partir du VIIIe siècle av. J.-C., l'Italie entière se transforme, les Grecs installent des
colonies, les
Étrusques étendent leur royaume vers le sud, le commerce s'intensifie, l'agriculture se développe car des Sabins (traditionnellement agriculteurs) s'installent. La tradition dit que la ville accueille voleur, esclave en fuite et autres indésirables. De nombreuses villes se créent, tandis que les communautés villageoises ont tendance à régresser. Rome est à la croisée des nouvelles routes commerciales. Une assemblée de
senes (hommes mûrs) et
patres familiarum ayant autorité sur les membres de leur famille, mais aussi sur le plus grand nombre possible de clients, dirige. Le concept de patricien, celui qui descendent des
patres, a dû se constituer à cette époque.
Le développement de Rome
Le Sénat (de 100 membres) comme les
comices curiates sont, selon la tradition, créés par
Romulus. Les comices forment une assemblée de 30 membres qui est élue à partir de collèges tribaux. Trois collèges (de Sabins, de Romains, et de tous les autres), élisent chacun dix membres dans une
curia. Dès le début de Rome, plusieurs guerres victorieuses, attribuées à Romulus, étendent le contrôle de la ville dans le
Latium. L
ager publicus romanus est étendue. Au VIIe siècle av. J.-C., à Rome, le
reges Tullus Hostilius crée les
curiae novae, non pas sur des origines toponymiques ou ethniques, mais en s'appuyant sur les
gentilices: c'est la fin du tribalisme. Dans les campagnes les maîtres et les serviteurs vivent une vie commune, qui sur le fond n'est pas très différente.
Au VIe siècle av. J.-C., Rome est la plus grande ville de l'Italie. Les armées les plus puissantes sont organisées suivant la technique grecque de la Phalange de hoplites qui sont des soldats pédestres (fantassins) lourdement et uniformément armés et protégés. La cavalerie, et plus particulièrement les chars, apanage des gentilices, est marginalisée par ce type de formation militaire. Ce développement militaire a, en Grèce comme à Rome, facilité la contestation du pouvoir aristocrate ou patricien. D'autre part, ces mêmes gentilices ne sont plus en mesure d'aligner et surtout d'équiper un nombre suffisant de hoplites pour pouvoir lutter contre des cités étrusques s'appuyant sur un demos nombreux. Rome est alors conquise par les Étrusques qui vont doter la ville d'infrastructures nombreuses, temples, ports, bâtiments publiques, adductions d'eau, et c'est par milliers que des étrangers viennent alors s'installer à Rome. L'influence grecque, qui marque aussi fortement les Étrusques, est de plus en plus présente. Les produits manufacturés grecs comme les poteries en témoignent. La philosophie, la religion, l'art militaire s'hellénisent.
Pour pouvoir résister aux invasions extérieures, les rois étrusques de Rome vont chercher à créer leur propre armée de hoplites. Pour échapper aux pressions patriciennes, les rois vont chercher à diminuer l'influence des liens sacrés (fides) qui relient les patrons et leurs clients. Ils parviennent à lier les hommes libres en sodales par la fides pour défendre la cité. Cette relation est fondamentale. Suivant la tradition, Servius Tullius, premier roi non élu et d'origine servile comme son nom l'indique, transforme l'armée et par conséquent le rôle de chacun au sein de la cité. Il change donc le fondement de la société romaine. Comme le niveau d'équipement d'un hoplite dépend de sa fortune, pour connaître le nombre et le type des combattants disponibles, le Cens est créé, les Comices centuriates et les Tribus s'occupent de cette tâche. Servius Tullius va jusqu'à distribuer lAger publicus, c'est la première réforme agraire connue.
La population, dès lors augmente constamment, 80 000 civites au Ve siècle av. J.-C., 130 000 en -508, 157 000 en -498.
Sources
Historiographie
L'histoire légendaire de la monarchie romaine nous est parvenue, notamment par Quintus Fabius Pictor,
vers 260 av. J.-C., établit une liste de sept souverains pour 243 années de règne, donc avec une moyenne extraordinaire de 35 ans par règne. Plus tard, d'autres auteurs comme
Tite-Live,
Plutarque,
Denys d'Halicarnasse,
Varon écriront leurs récits en s'appuyant vraisemblablement sur celui de Pictor. Aucunes archives n'étaient disponibles pour ces auteurs antiques car Rome fut incendiée en
-390 par les
Gaulois (voir
Oies du Capitole).
De l'avis des historiens modernes, les noms comme les dates des règnes des quatre premiers de ces rois, tout comme l'alternance de noms sabins et latins, sont plus légendaires qu'historiques, tandis que les trois derniers rois, d'origine étrusque, ont une existence qui paraît moins incertaine.
Certains interprètent la succession d'événements rapportés par Tite-Live. Ainsi J. Heugron propose le scénario suivant : Porsenna, roi de Clusium, organisa une invasion du Latium comme l’avaient précédemment fait Tarquinia et Vulci, chassa les Tarquins et occupa Rome, d’où il attaqua ensuite Aricie, s’opposant à une coalition des Latins et de Cumes, qui le mit en échec. Heugron relève que les Fastes consulaires des premières années de la République recensent plusieurs noms d’origine étrusque comme magistrats : Larcius en 506, 498, 490, Herminius en 506, Aquilius Tuscus en 487, indices d’une présence étrusque perdurant à Rome au dela de 509. Le départ des Tarquins ne signifierait donc pas la fin de l'influence étrusque.
Apports de l’Archéologie
L’archéologie observe pour la période de la monarchie romaine un net enrichissement des tombes avec la présence d’objets de luxe importés (quatrième phase, dite orientalisante, de -
730 à
-570 pour la chronologie de Müller-Karpe-Peroni). Les céramiques grecques et étrusques sont présentes dans tout le Latium et attestent de contacts précoces avec les commerçants grecs. C’est à cette période que se rattache le plus ancien document écrit connu du
Latium, la
Fibule de Préneste datée du début du VIIe siècle av. J.-C.. On en déduit l’introduction probable de l’écriture à Rome à cette époque.
A Rome même, de nombreux vestiges de l’époque monarchique ont été fouillés au cours du XXe siècle avec des méthodes de plus en plus fines : Articles connexes : .
Notes
Voir aussi
Liens internes
- Au Xe siècle, le titre de roi des Romains a été ressuscité dans le Saint Empire romain germanique : l'empereur élu portait ce titre jusqu'à son couronnement par le Pape.
- Il y a eu aussi un Roi de Rome en la personne du fils de Napoléon Ier, Napoléon II.
Liens connexes
Lien externe